SMED : (2/4)
Le principe

Souvenez-vous : “le pourquoi du travail par lot” ...

SMED le sigle

C’est ce que nous avons commencé à voir dans le précédent article (SMED : Le Principe 1/4) de cette série dédiée au SMED.

 

Pour rapide rappel, nous avons vu que l’on travaille par Lot pour diminuer l’impact financier du réglage de la machine sur le coût de revient unitaire de la pièce produite.

Mais nous avons aussi vu qu’il fallait faire preuve de discernement. En effet, au-delà d’un certain seuil, l’augmentation de la taille de lot ne permet de réduire l’impact du réglage que de façon marginale (quelques “pouièmes”) puisque le temps de ce dernier est devenu négligeable au regard du temps de production de la série.

Nous avons aussi montré que l’augmentation de la taille de lot provoque une forte augmentation du BFR (Besoin en Fonds de Roulement) ainsi qu’une perte de réactivité, flexibilité, agilité pour l’entreprise.

Mais il existe un phénomène encore plus pernicieux !

En effet, avec l’amélioration des sciences et technologies, les machines se sont perfectionnées. Ainsi, une pièce faite en une minute sur une ancienne “bécane”, sera faite en 10 secondes sur une nouvelle.

De plus, cela fait 100 ans que les industriels cherchent la “machine à tout faire”. Et les ingénieurs parviennent à les satisfaire en partie…

Engrenages dans la main de l'homme

En revanche, cette “machine à tout faire” très rapide est souvent plus complexe et délicate à utiliser. Il faut alors des “Bac+2” (voire +) pour la régler et la maintenir, là où autrefois un ouvrier s’en sortait sans problème.

Nota : Je ne nie pas que l’avènement de l’informatique et la connaissance du SMED chez les fabricants de machine, ont permis au cours des 10 dernières années, d’améliorer l’accessibilité et l’ergonomie de leurs produits. Mais ce n’est pas toujours le cas !!!

Nota 2 : Je ne suis absolument pas contre l’évolution technologique des machines. Bien au contraire ! Mais à condition d’avoir une approche holistique (raisonner sur la globalité) et pas seulement en fonction du coût de revient unitaire …

Le résultat est bien souvent, un temps de réglage qui augmente de par la complexité et la précision des nouvelles machines, quand le temps de production diminue de par leur vitesse de production.

Dans ces conditions, et avec ces mêmes calculs, pour conserver sa marge un industriel aura tendance à augmenter la taille de ses lots de production en les passant à 2 000, 3 000 ou 5 000 au lieu des 1 000 initiaux.

Le Lot, ... aussi par nature industrielle et humaine

Comme nous l’avons vu, le lot est la conséquence d’un schéma mental et industriel basé sur l’optimisation du coût de revient (et donc, de la marge).

Mais d’autres facteurs entrent en ligne de compte.

L’ère industrielle s’est positionnée en opposition à l’artisanat. L’artisan fabrique son produit “de A à Z”. Avec l’industrie, la production de masse a vu le jour. Il a fallu recruter des ouvriers, peu qualifiés, et les faire produire rapidement. Aussi il était plus pratique de les former à ne faire qu’une chose. La segmentation des procédés de fabrication est intervenue et par voie de conséquence, les îlots de fabrication sont apparus.

Aujourd’hui encore la grande majorité des usines ont des îlots dédiés.
Par exemple chez les usineurs, il y a : Le débit matière (les scies), le tournage, le fraisage, la rectification, le contrôle, l’emballage, etc.

L’artisan usineur qui “travaille dans son garage”, il fait tout … mais son travail n’est pas compatible avec une production de masse (des lots importants) par définition, très répétitive.


Enfin, un autre phénomène me semble être “la nature humaine”. Peut-être est-ce un conditionnement depuis notre plus jeune âge, mais j’observe que notre premier réflexe lorsque nous avons une tâche répétitive à accomplir est de segmenter et de regrouper.

En un mot comme en cent, instinctivement, nous travaillons en lots et files d’attente

… plutôt qu’en flux

Et si ...

Et si … cela faisait 150 ans que l’on “raisonne à l’envers” ?

Et si … j’avais une baguette magique ?

Et si … je pouvais changer de série instantanément, comme ça, en un claquement de doigts, en un clin d’œil ?

Dessin du magicien Merlin l'enchanteur

Que se passerait-il ?

C’est très simple, le temps de changement de série serait alors nul !

Et s’il était nul, son coût aussi serait nul … et donc, il n’interviendrait plus dans le coût de revient unitaire de la pièce.

Dès lors, je pourrais faire du pièce à pièce, ce qui signifie que …

… je n’aurais plus besoin de produire par Lot !

Ainsi, je pourrais fabriquer exactement la quantité demandée par mon client (qté vendue, je le rappelle) et pas plus.

Je n’aurai plus à me soucier du temps de réglage … puisqu’il n’existerait plus !

Et livrer son client juste pour juste … cela ne vous rappelle-t-il pas un peu un des fondamentaux du Lean ?

Le principe fondateur du SMED

Cela fait 150 ans que nous prenons le problème à l’envers !

Cela n’était pas gênant dans les 30 glorieuses (ou avant). Lorsque la demande était nettement supérieure à l’offre. Mais dans un marché saturé, où l’offre excède de loin la demande, la production de masse perd de son sens.

Plutôt que réduire l’impact du coût du changement de série

en produisant en masse, …

… il faut réduire le temps de changement de série lui-même

(voire le faire disparaître) !

Nota : Pour ceux qui me connaissent un petit peu. “Réduire l’impact du changement de série”, c’est pallier au problème en produisant par lot, c’est mettre une rustine, mais ce n’est pas le résoudre. “Réduire le changement de série”, c’est résoudre le problème.

Le principe du SMED :

Réduire votre temps de changement de série,

vous permettra de réduire la taille de vos lots de fabrication

Voilà à quoi sert le SMED !

À réduire la taille des lots et à rien d’autre !!!

Et, NON, ce n’est pas une méthode pour gratter du temps de production sur le temps de réglage !

La règle du 1 pour 10

Tout ça, c’est bien joli, mais cela reste un principe… et je n’ai pas de baguette magique.

Alors OK pour réduire le temps de changement de série, mais de combien ? De 10 %, de 50 %, de 80 % ?

Jusqu’où aller et où s’arrêter ?

C’est ici que Toyota a défini une règle empirique. Je l’appelle “la règle du un pour dix”.

Logo Toyota en relief

Elle consiste à dire que les temps alloués aux changements de séries ne doivent pas excéder 1/10e du temps de disponibilité des machines.

Par exemple, si votre temps de changement de série dure 1 heure, vous devez produire ensuite pendant 10 heures.

Mais si, avec le SMED, vous parvenez à réduire votre temps de changement de série à 6 minutes, alors vous ne devez plus produire que pendant une heure.

Le résultat sera un lot d’une taille dix fois moindre.

Il sera ainsi beaucoup plus facile de se rapprocher de la demande exacte du client et de le fournir juste pour juste.

Toutes les pièces que vous fabriquez sont vendues. Plus de stockage, moins de manipulations, plus de disponibilité pour répondre vite aux clients et un BFR réduit. Que du bonheur !

Autre grand avantage. Si un réglage et sa prod durent environ 1 h 06, alors sur une journée de 8 h, vous pouvez effectuer presque 8 productions différentes tout en respectant la règle du 1 pour 10.

Je vous laisse imaginer  ce que cela apporte en termes de flexibilité et souplesse.

Sans compter la possibilité de changer très rapidement le planning de prod. pour répondre à un aléa. Cela permet donc une très grande réactivité et donc une super capacité d’adaptation !

C’est la règle que je préconise de suivre. Elle vous permettra de fixer un objectif à atteindre sans aller trop loin dans le SMED.

Les prochains articles

Comme évoqué la fois dernière, je poursuivrai cette série par les deux articles :

Et vous, faites-vous du SMED dans l'esprit SMED au sein de votre entreprise ?

Je vous remercie d’avoir pris le temps de lire cet article. J’espère que vous l’avez apprécié. N’hésitez pas à laisser un petit commentaire que vous partagiez ou non ma vision des choses…

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